Et voilà, je n’avais encore jamais lu de roman de Grégoire Delacourt, pourtant plusieurs m’avait tentée. C’est toutefois désormais chose faite avec Danser au bord de l’abîme. Je ne sais pas pourquoi mais j’avais un feeling qui me disait que ce roman serait un coup de cœur pour moi et pourtant je n’en avais rien lu ou presque. On ne sait d’ailleurs presque rien du livre si ce n’est que c’est l’histoire d’Emma, 40 ans, mariée, trois enfants, heureuse qui croise le regard d’un homme dans une brasserie. Autant dire qu’on ne sait pas grand-chose de ce roman et en même temps on en sait bien assez.
– Faut-il vivre les choses alors qu’il est aussi beau de les rêver ?
C’est lui qui sourit maintenant.
– Pasolini, dans le Décameson. Il joue le rôle d’un élève de Giotto qui, à la fin du film, se demande pourquoi réaliser une œuvre quand il est aussi beau de la rêver.
Dès les premières phrases, j’ai plongé dans l’histoire d’Emma. Emma c’est une femme touchante, émouvante, comme n’importe quelle femme que l’on peut croiser. Rien d’extraordinaire. Elle a 40 ans, elle est mariée depuis des années et elle est heureuse dans son couple et avec sa famille. Elle a une mère un peu particulière, une meilleure amie dont elle est proche et un boulot qui ne lui plaît pas. On découvre un peu son parcours, sa vie, ce qu’elle aurait aimé faire, ce qu’elle fait réellement. On s’attache à elle et j’ai ressenti comme un écho à ses pensées, ses envies, ses émotions. Je me sentais proche de ce personnage, émue par chaque sentiment.
Un jour donc, Emma va manger dans une brasserie lambda. Ce jour-là changera le reste de sa vie. Elle va apercevoir un homme qui ne la remarque pas. Mais elle, elle ne voit que lui. Sa bouche, ses yeux. Elle est incapable de le quitter des yeux. Pourtant, comment peut-elle s’amouracher ainsi d’un inconnu alors qu’elle aime son mari, qu’elle aime sa famille ? Le lendemain, elle revient et ce coup-ci, l’inconnu la remarque, la fixe, et un jeu de regards s’installe.
L’idée de laisser partir ceux qu’on aime possède la violence d’un crime.
J’ai trouvé vraiment réussi les émotions décrites. Emma nous montre sa culpabilité, son désir, son amour, ses remords. Loin d’une infidélité assumée, on voit vraiment le moment où elle bascule. On la voit d’abord lutter, tenter de garder la tête hors de l’eau et ça m’a semblé tellement plus juste, plus fort aussi. On ne voit pas cette femme tout larguer d’un coup, et ça n’en paraît que plus réaliste.
Je le sais maintenant. Notre besoin d’être aimé est insatiable et nos amours, inconsolables.
Revenons-en aux généralités sur le roman maintenant. Déjà les personnages, entre Emma qui m’a subjuguée, Olivier (le mari) qui m’a émue, énervée, attristée, les enfants que j’ai trouvé parfois injustes, parfois trop doux mais toujours réalistes. Mais aussi l’inconnu qui m’a intriguée, envoûtée. J’ai vibré avec Emma dans l’attente de la découverte de cet homme, j’ai craint qu’ils succombent, j’ai eu envie qu’ils succombent. Les personnages secondaires sont fabuleux, ils apportent tous un quelque chose à l’histoire, permettent d’aborder des thématiques variées et de façon différente. Mais surtout, il y a un autre personnage que l’on retrouve régulièrement tout au long du livre, un personnage bien connu : la chèvre de M. Seguin.
Et oui, Grégoire Delacourt intègre l’histoire de la Chèvre de M. Seguin dans son récit et c’est tellement juste, tellement logique que cela donne envie de relire ce classique. Honnêtement, j’ai lu cette histoire quand j’étais petite et je pense que je n’avais pas saisi tous les détails, tous les sentiments contenus dans ce texte. En relire des passages m’a bouleversée. La comparaison entre ces deux histoires est vraiment logique, vraiment juste. Et c’est une réussite d’avoir eu l’idée de mettre en commun ces deux histoires dans un roman. Quel coup de maître de Grégoire Delacourt !
Et sur le roman en général alors ? Divisé en plusieurs parties, l’auteur a réussi à me surprendre. Je craignais une fin pour la première partie, j’étais persuadée que cela se déroulerait ainsi et … Pas du tout ! J’ai été abasourdie. J’en suis restée figée face à ma lecture pendant quelques instants avant d’entamer la deuxième partie. Et chacune de ces parties est différente, nous entraîne dans d’autres émotions.
En bref Danser au bord de l’abîme c’est …
Honnêtement ce roman m’a éblouie. Il m’a émue, il m’a touchée, il m’a emportée complètement. J’ai eu un coup de cœur énorme pour ce livre. Je me suis sentie proche d’Emma, je me suis laissé vivre la vie de ce personnage comme je l’avais rarement fait. A chaque page, je me retenais de prendre en note quelques citations. Bon cela dit, comme vous pouvez le constater tout au long de la chronique, j’ai pris déjà pas mal de notes ! En refermant le livre, je suis restée figée dans le temps, comme encore dans un entre deux. Je n’arrivais pas à quitter cette famille, cette histoire.
Alors M. Delacourt je ne peux pas vous remercier car maintenant j’ai un peu d’Emma en moi, j’ai cette histoire dans mon cœur, dans mon âme. Et en même temps, je suis donc obligée de vous remercie pour un coup de cœur pareil. Pour une histoire pareille. Je suis soufflée, sous le charme. Je suis brisée de les laisser derrière moi et pourtant ils sont maintenant en moi à vie. Une claque ! Wow.
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